lundi 25 avril 2011

Indian Bus World Company recrute


Être chauffeur de bus en Inde, c’est plus qu’une passion, peut être même un sacerdoce. Dans tous les cas, il faut avoir la foi. Quand on est passager dans un bus en Inde aussi remarquez, il faut avoir la foi ou aimer l’adrénaline…


Pour mieux illustrer ces propos voici une offre de recrutement :


Environnement:

Le candidat devra être capable de résister aux températures extrêmes est demandée, que cela soi pour des températures très chaudes ou très froide. Et oui, en Inde, les bus vont dans l'Himalaya et il fait plutôt froid la haut.
Un très haut pourcentage d'humidité sera également présent dans les conditions de travail. Une expérience dans les saunas suédois serait donc un plus appréciable.
Le candidat devra passer et réussir un test de vision afin de prouver le bon état de ces yeux. Si le test ne devait pas s'avérer concluant, on pourrait envisager un rattrapage avec un test de conduite à l'aveugle, juste au feeling. Après tout, ce qui compte vraiment, c'est le feeling! Dans les deux cas, les yeux et autres organes respiratoires du candidats devront démontrer des prédispositions pour résister à la poussière. Un filtre artificiel, ou un don naturel serait un plus non négligeable.
Le candidat devra posséder un système auditif suffisamment évolué pour pouvoir faire abstraction des sons environnants durant les heures de travail. Un filtre anti-klaxon serait des plus appréciés. ( Chez Indian Bus World Company, on prend soin de ces employés et on ne recrute que des mutants ou des super héros).


Capacités requises:

Suite aux pré-requis énoncés précédemment, une excellente condition physique est à prévoir. Des bras plus robustes que ceux de Mr Propre seront nécessaires pour manœuvrer le bus par tout temps, tout type de route et de revêtement.

 Une expérience de slalomeur est exigée. Un podium à l’issue du slalom géant de Kitzbühel n'étant pas considéré comme une expérience suffisante. N’oublions pas que à Kitzbühel, ces malheureux poteaux de slaloms sont immobiles, et ne s’offusquent pas quand on les percute Les usagers de la voirie indienne quand à eux, se déplacent de manière fort aléatoire, illogique et totalement imprévisible. De plus il est dans l’intérêt de tous de limiter les contacts avec ces mêmes usagers ou autres obstacles présents sur la chaussée.

Puisque l’on est dans les compétences de pilotage, un test de type Midtown Madness ou Mission de Taxi dans GTA, vous sera imposé avant de vous remettre les clefs du bus (Si si, il se démarre encore avec une clef, malgré son état de vieillesse avancé)

Des nerfs d’aciers sont demandés. L’exemple de Tom Cruise (ou plutôt de ses doublures )dans Top Gun est à prendre en considération. Un bon chauffeur de bus attendra le dernier centième de seconde avant le contact frontal pour changer de direction. Il devra résister aux appels de phares, klaxons, et autres cris et gestes émanant du véhicule lui faisant face. Dans le cas ou l’objet de la collision soudaine ne soit pas un véhicule, mais un animal, il est bien évident que l’animal va attendre le dernier moment pour se pousser (ou pas, de toute façon, il y a beaucoup trop de chiens errants dans ce pays!).

Des compétences de dialogue et de négociation sont indispensables. Dans votre carrière de chauffeur de bus vous serrez inévitablement confronté au paramètre : « Je viens de toucher, percuter, emboutir, renverser (rayez les mentions inutiles), un vélo, rickshaw, piéton, vache sacrée, chien errant, camion, tracteur, Tata Nano ou autre (La aussi, rayez les mentions inutiles). Et bien dans toutes ces situations, il faudra descendre du bus, faire un bref constat des dégâts et trouver une solution à l’amiable. Les négociations pouvant durer plusieurs heures, un background il faudra être convaincant et résistant. Votre voix doit être claire, et vous n'hésiterez pas à hurler pour impressionner et faire entendre votre point de vue. Il faudra aussi gérer les 117 passagers (on ne confie des bus surchargés qu'aux conducteurs expérimentés, vous n'aurez pas plus de 130 passagers lors de vos premières années)de votre bus qui après 8h de route aimerait bien voir la fin des 250 kilomètres du voyage.

Veuillez nous remettre vos candidatures en mains propres, le courrier transitant dans nos bus, nous savons bien qu'il n'est pas sur d'arriver au bon endroit...

Indian Bus World Company Pvt. Ltd.
Une entreprise du groupe Tata world
Siège social quelque part en Inde!
Second employeur du pays après Indian Rail World Company


(to be continued...)

Direction le Pakistan.





En plus d’être un grand lieu de pèlerinage, Amritsar est également une étape pour toute personne désirant se rendre au Pakistan. En effet, le seul point de passage entre les deux pays est situé à une trentaine de kilomètres de la ville au Temple d’Or.

Tous les jours, quelques rares étrangers, mais aussi des Indiens ou des Pakistanais traversent la frontière, après plusieurs heures de transit, de vérifications et de papiers administratifs dont on raffole de ce coté du globe.
Mais en fin d’après midi, la frontière se ferme, et cela est l’occasion d’une cérémonie plutôt étrange.
Plusieurs milliers d’indiens convergent tous les soirs vers le poste frontière pour assister à la cérémonie qui entoure la descente des drapeaux indiens et pakistanais de chaque coté de la frontière.

Arrivé près de la frontière, une fois descendu du taxi, des vendeurs sautent sur les arrivants, et une fois n’est pas coutume, ils passent plus de temps à essayer de vendre leur produits aux indiens qu’aux étrangers. Leurs produits, ce sont des drapeaux indiens, des splendides visières, des t-shirt ou des turbans, le tout aux couleurs du pays. Il parait qu’il faut avoir tout cet attirail pour « encourager l’Inde contre le Pakistan ».

Vous l’aurez sans doute compris, les relations entre les deux pays sont compliquées, et cet événement de la frontière est très particulier pour les indiens (Pour les pakistanais aussi d’ailleurs). Tout le monde se dirige vers la frontière, ou des tribunes ont été aménagées de chaque coté de la route. La foule est déjà très nombreuse, et n’en fini pas d’arriver. J’arrive à me trouver une place, pas trop entassé parmi la foule (du moins pas encore) et j’essaye de comprendre ce que je vois :

J’ai l’impression d’être dans un stade banal, sauf que celui-ci est traversé dans la longueur par une route, et qu’il est coupé dans la largeur par deux grands murs et deux portes en métal au niveau de la route. Cela délimite la frontière entre les deux pays. Chacune des portes est peinte aux couleurs du drapeau du pays, ce qui n’est pas d’un meilleur goût, mais on ne rigole pas avec le patriotisme ici!

Dans chaque tribune (coté indien et coté pakistanais), les hommes et les femmes sont séparés (sauf quand on est VIP) et chacun encourage son pays…
Pour tout ce qui va suivre, imaginez un miroir entre la partie indienne et la partie pakistanaise. Le but étant de faire dans la surenchère permanente. Une sono infâme crache de la musique, le but étant d’avoir le son plus fort que celle du voisin située 20m plus loin. La musique n’a pas grand-chose de traditionnelle, et cela ressemble plus à de la musique de night club des années 80-90 mais peut être que c’est la musique du moment ici. Sur ce point je n’ai pas souhaité en savoir plus!
Pour chauffer la foule, un animateur tout de blanc vêtu (impossible de le louper) crie dans le micro, et demande à des volontaires de venir agiter le drapeau indien devant la foule en délire. C’est rigolo pour les trois premiers volontaires, au bout de 250 je m’impatiente un peu… La musique devient un peu plus patriotique, des chants célébrant l’Inde se font entendre et le public reprend en cœur. Puis, peu être parce que le timing n’était pas au point, retour de musique très moderne cette fois ci, et là encore de nombreuses volontaires viennent danser sur la route. Je ne sais pas pourquoi il n’y a que des femmes, mais cela ne fait ni très sérieux, ni très militaire. C’est juste du grand n’importe quoi, mais tout le monde a l’air d’apprécier (Merci je ne suis pas encore complètement transformé en indien!). Après un certain temps, retour du grand empaffé qui sert de chauffeur de salle, il annonce quelque chose qui fait hurler la foule. Puis il commence à crier dans le micro Hindustan ce à quoi la foule répond Zindabad. Cela doit être le achic achic aie aie aie local! Après avoir bien postillonné dans le micro pendant environ 32 fois, les militaires commencent à s’agiter un peu.
L’un d’entre eux se dirige vers les grilles qui sont fermées, les ouvre, disparaît dans la zone mixte et revient tranquillement ensuite. Je le soupçonne fortement d’être de connivence avec son homologue pakistanais. Ils ont du s’assurer que tous les VIP étaient arrivés des deux cotés pour pouvoir commencer…
D’autres militaires sortent d’une salle de garde. Ils ont une étrange tenue, mais le plus étrange reste ce turban, digne d’un grand film de science fiction futuriste. En tout cas cela ne me semble pas très pratique les jours où le vent ne vient pas de face!  Toujours est-il qu’ils sortent les uns après les autres en gesticulant dans tous les sens mais d’une démarche qui à l’air très officielle. Ce n’est plus un pas de l’oie qu’ils font mais un véritable saut de flamand rose. Pour vouloir me désarticuler la jambe du reste du corps, je ne m’y prendrais pas autrement! Après quelques tours de piste ils s’immobilisent. Le gugus en blanc revient avec un micro tout neuf, hurle des Hindoustan Zindabad dans tous les sens. La foule est en délire complet et le fait de voir les 5 militaires se diriger vers la porte de la frontière semble décupler leur force. 
Du coté pakistanais c’est pareil. Le costume des militaires (je n’ose pas parler d’uniforme) est différent, et les mimiques de la parade aussi, mais on entend des Pakistan Zindabad qui montent de la foule. Les indiens se moquent d’eux. Cela ressemble un peu à un dialogue du genre « Hey, les Romains vous êtes des Romaines! ».
Enfin les militaires s’approchent de la porte pour de bon. Dans un mouvement à perdre les deux bras d’un coup, l’un d’entre eux ouvre la grille de toutes ses forces. Celle-ci se retrouve propulsée sans rien avoir demandé à personne (sauf peut être un changement de couleur). Je ne vous refais pas l’image de la foule en délire, mais cela continue plus que jamais. Finalement un second militaire vient franchir  la grille, et s’approche du mat du drapeau indien qui est de l’autre cote. Son homologue paki fait de même. Ils démêlent l’attache du drapeau en envoyant la corde en l’air de manière très théâtrale. Puis finalement, commence à descendre le drapeau. C’est un geste très technique car il ne faut en aucun cas que son drapeau ne se retrouve à un niveau inférieur du drapeau du voisin. Cela déclencherait un bel incident diplomatique sans aucun doute.


Une fois descendu, le drapeau est plié en deux secondes, les militaires indiens et pakistanais se font face, se font un petit combat du regard, une grimace et chacun retourne chez soi, non sans avoir de nouveau explosé la grille sur ses gonds. Ils doivent changer de grille toutes les 3 cérémonies.
Et voila, c’est fini, tout le monde applaudit, essaye de se diriger vers la frontière mais sont retenus par une chaîne qui empêche tout le monde de traverser.  Et tout le monde rentre chez soi. Les vendeurs sont de retour cette fois avec un DVD de la cérémonie. Non je ne suis toujours pas intéressé. Le temps de retrouver le taxi parmi les 854 présents sur le parking, je me dit que quand même cela doit faire drôle de traverser la frontière dans la journée et de passer à travers ce stade au milieu de la route. Je retrouve le taxi et il faut encore retrouver les autres indiens qui étaient dans le taxi et qui semblent s’être perdus dans la ligne droite puis on peut retourner vers Amritsar manger quelques chapatis!

Je n’ai pas franchement été au Pakistan, mais j’ai réussi à m’en approcher à moins de 20m en toute légalité ce qui n’est pas partout le cas. C’est un peu faible comme motif pour justifier l’après-midi d’attente quand même.
La prochaine fois j’irai au cirque, au moins il y a des lions et des tigres la bas !!

jeudi 21 avril 2011

Un voyage au pays des turbans.



Pour la fin du carême local, un jour férié était de mise. J’en ai donc profité pour m’éclipser de Panipat, et aller faire un peu de tourisme.

Je ne vais pas décrire ici le voyage en train pour rejoindre Amritsar, j’attends d’avoir un peu plus d’expérience dans les transports en communs indiens pour le faire. Il m’a néanmoins fallu 6h de voyage, assis sur une banquette plutôt inconfortable pour parcourir les 350 kilomètres qui séparent Panipat d’Amritsar. Le paysage laisse apparaître des champs de blés qui défilent tout le long du trajet. La moisson est très proche dans cette région de l’Inde. L’Haryana (là ou est Panipat), et le Punjab (là ou est Amritsar) qui sont deux des états du nord-ouest de l’Inde sont parmi les plus riches. Ils portent le nom de « grenier de l’Inde », et fournissent 80% du pays en blés et farines.

Si le Punjab est un nom qui semble familier à nos oreilles d’occidentaux c’est parce que ses habitants composent une diaspora dont les membres sont très présents au Royaume Uni, au Canada, et dans une moindre mesure, en France. Les Punjabis étant à grande majorité de confession Sikh, c’est pour cela qu’il est très courant de rencontrer des Indiens en turbans dans ces mêmes pays. Et preuve s’il il en faut que nos clichés sur l’Inde sont parfois faux: les Sikhs (et leur fameux turban) ne représente qu’une minorité de la population indienne (2%).

Ma destination du jour, Amritsar est une ville sainte pour les Sikhs, qui s’y rendent en pèlerinage très souvent. C’est donc pour cette raison que j’ai intitulé ce week-end : Voyage dans la capitale du turban.

J’ai rejoint Amritsar en début d’après-midi. Le temps de traverser la ville en rickshaw (les vélos porteurs) et je suis arrivé au Temple d’Or, lieu de convergence de tous les pèlerins, et touristes. Première impression, je suis dans une ville où les touristes sont nombreux, donc les vendeurs sont nombreux, donc les sollicitations sont permanentes. Je résiste donc à l’achat de magnifiques posters taille A1 avec des motifs aussi jolis que le temple d’Or, ou des trucs plus chics tels que des splendides bébés blanc tous joufflus, où des petits chiots dans un panier. Je me demande comment on peut oser vendre ça des fois. Et pire encore, qui peut bien les acheter.
Une fois ces premiers vendeurs franchis, d’autres me proposent des bandanas pour me couvrir la tête, c’est obligatoire pour entrer dans l’enceinte du temple. Peut être, mais je ne suis pas encore dans le temple et je ne vais pas acheter un bandana sale pour 10 roupies alors qu’il vaut probablement moins de 50 paisas (0.5 roupies).

Je m’avance vers l’édifice, laisse mon sac et mes tongs dans un vestiaire, trouve des bandanas gratuits (je vous l’avais dit!) et peut enfin pénétrer dans ce lieu formidable qu’est le temple d’Or.

C’est assez simple à décrire, et les photos parlent d’elles mêmes. Dans une enceinte carrée de bâtiments tout en marbre blanc, un immense basin est présent. Au milieu de celui-ci trône le temple d’Or en lui-même Un bâtiment tout doré qui renferme le livre saint des Sikhs. Cela fait un peu surnaturel, en tout cas c’est magnifique.


Les pèlerins font le tour du basin, certains s’arrêtent pour se baigner dans l’eau sacrée et font ensuite la queue interminable qui mène à l’intérieur du temple. Des haut parleurs crachent les chants de quatre personnes qui

Après avoir passé l’après midi à faire le tour du basin, à regarder les ablutions des fidèles, écouté les chants des prêtres et répondu aux nombreuses sollicitations des Indiens, je me décide à chercher un endroit ou dormir. 
 
Un truc de formidable chez les Sikh, c’est que dans tous leurs lieux de culte (les Gurdwaras), il y a possibilité d’hébergement et de repas pour les pèlerins. Comme Amritsar, c’est le plus grand temple, les lieux d’hébergements sont proportionnés et tout le monde s’entasse dans d’immenses bâtiments.
Comme je suis arrivé un dimanche, l’endroit était surpeuplé, et les pèlerins s’installaient un peu partout pour dormir. Les chambres étaient surpeuplées, les couloirs infranchissables et même le grand patio intérieur ressemblait à un immense dortoir à ciel ouvert. Une petite chambre est réservée aux étrangers. Là aussi, ce sont des conditions très spartiates ou les lits sont empiles dans tous les sens. Certains personnes arrivées au milieu de la nuit on même dormi par terre, faute de lit.
Je réussi à obtenir un lit qui est en fait une grande planche de bois sur pieds et j’entamé la discussion avec les personnes présentes.
Cela fait du bien d’entendre un anglais prononcé autrement qu’avec l’accent indien si particulier. Je me rends aussi compte que en un mois et demi, mon niveau d’anglais a bien chuté. Cela vient surtout du fait que au quotidien je n’hésite pas  à mal parler anglais pour mieux me faire comprendre.

Pour les repas, tout se passe dans un immense bâtiment. Il faut suivre la file de personne, attraper un plateau à compartiment, un bol et une assiette puis se diriger dans une immense salle ou tu le monde s’assoit en rangs d’oignons bien serrés (on est en Inde, donc on aime bien s’entasser les uns sur les autres). On pose le plateau devant soit et des bénévoles viennent le remplir. Comme c’est de la production en chaîne les serveurs versent la nourriture dans les plateaux à l’aide d’une louche sans s’arrêter entre les assiettes et de la même façon, l’eau est servie avec des arrosoirs, c’est bien plus pratique comme ça. 
Des bénévoles s’agitent dans tous les sens pour s’assurer que tout le monde est servi. J’ai été très impressionné par autant d’efficacité dans l’exécution des taches. Après bientôt deux mois en Inde c’est une véritable surprise de voir un système aussi bien huilé fonctionner sans accroc. Surtout que les bénévoles tournent et qu’il faut les encadrer. Une fois le repas fini, on rend le tout qui part pour la vaisselle. On balance donc tout dans une énorme piscine et après 3 étapes de lavages et 5 de rinçage, les ustensiles repartent pour d’autres personnes. Tout est transporté dans d’immenses chariots, cela fait un vacarme terrible et surtout cela ne s’arrête jamais car la cantine et la cuisine tournent 7 jours sur 7, H24.

Comme j’avais un peu de temps à occuper, et que j’ai vraiment été bluffé par la logistique des repas, je me suis dit que j’allais sortir un peu des chemins touristiques pour aller jeter un oeil dans les coulisses. J’ai commencé par la machine à faire des chapatis (Pour les incultes, un chapati c’est comme un tortilla mexicaine, mais avec un goût plus proche de la crêpe bretonne et on mange tous les plats avec, pour les indian friendly, un chapati c’est un chapati). Cette machine est connue dans toute l’Inde, c’est un donateur libanais qui l’a offerte au temple. Depuis trois autres sont venues rejoindre la première et chacune peut produire plus de 1000 chapatis par heure. Tout le monde en est très fier. Une fois que j’étais rentré dans les cuisines j’allais pas en ressortir aussi vite, j’ai donc continué pour tomber sur des endroits ou d’autres personnes faisaient des chapatis à la main suivant la manière traditionnelle. Plus loin, d’autres femmes en saris étaient submergées par des montagnes d’oignons et de carottes et les préparaient inlassablement. Un peu plus loin des marmites immenses faisaient bouillir des lentilles et des poids chiches.
La visite n’étant pas finie j’ai découvert une pièce servant à alimenter les réchauds des marmites. Comme le gaz de ville n’existe pas vraiment, on improvise à la manière indienne : Plus d’une trentaine de bonbonnes de gaz étaient connectées en série!
J’ai également jette un œil dans les énormes entrepôts, ou toute la nourriture est stockée. C’est franchement ahurissant de voir de telles quantités, on se croirait dans une coopérative agricole qui vient de faire le plein, mais non, ici, tous ces stocks ont une durée de vie très limitée.

J’ai gardé le meilleur pour la fin (ou la faim): Deux IMMENSES marmites dans un coin reculé des cuisines. L’une servait à la préparation des lentilles, l’autre au dessert sucré à base de riz et de lait de coco.
La capacité de chacune de ces marmites (piscine serait un terme plus approprié) est de 2700 kilos. C’est bien ça oui, plus de 2.7 tonnes. Et ils font quatre tournées par jour… Pour nettoyer tout ça, et recommencer une autre tournée, c’est la lance à incendie gros calibre que l’on utilise pour l’alimentation en eau. Je n’ose pas imaginer le temps qu’il faut avant l’ébullition, je ne suis pas resté assez longtemps pour l’apprécier.

Une chose est sure, toute cette logistique est plus que bluffante, les proportions et les quantités consommées sont incroyables. La cantine permet de servir plus de 40 000 personnes par jour d’affluence régulière. Lors de festivals la quantité peut doubler.
Alors oui, après la visite des cuisines du Temple d’Or d’Amritsar, on peut le dire une fois de plus : Incredible India !!


Pour ceux qui veulent plus de détails sur les Sikhs, le Temple d’Or, ou la cuisine infernale : http://www.sikhiwiki.org/index.php/Golden_Kitchen

Pour voir mes photos de ce formidable week-end :






dimanche 3 avril 2011

Vous avez dit Cricket?




Bon, c'est vrai, cela fait un mois que je suis arrivé en Inde maintenant, et cela fait presque autant de temps que je n'ai pas pris le temps d'écrire le moindre article. Il faut dire que je ne suis pas en tourisme ici. Donc même si le quotidien est passionnant et réserve plein de surprises, il est difficile de le décrire. Prenons par exemple cette question que tout le monde me pose ici : "A quoi ressemble Paris?" Ou encore,  " A quoi ressemble la France?" Assez difficile de le décrire quand le référentiel et le quotidien des deux personnes engagées dans le dialogue est incomparable. Et bien là c'est pareil, dur de décrire ce quotidien. Je vais essayer en séparant les informations.

Aujourd'hui, parce que la coupe du monde vient de se finir, parce que cela fait un  mois que les matches s'enchainent et parce que tout cela se passait en Inde et bien on commence par le Cricket!
Comme le cricket est omniprésent dans les médias, dans la rue et dans les conversations je m'y suis intéressé. Par procuration au début, pour pouvoir tenir des discussions ensuite. J'ai commencé par apprendre  les règles du Cricket, j'ai regardé les matches de la coupe du monde , et je suis désormais capable de donner mon avis lors d'une conversation de Cricket! J'essaye de faire des prédictions sur le résultats des matches, et j'ai prédit que la Nouvelle-Zélande irait en finale, ce qui a fait rire tout le monde ici, jusqu'à ce qu'ils sortent les favoris en quart de finale et échouent de peu en demie. Maintenant on se méfie de moi!
S'intéresser au cricket, c'est un accélérateur d'intégration dans ce pays, parce que tout le monde ne parle que de ça. Sur 10 chaines de sport à la TV, 6 passent du cricket en live, 1 en différé et les autres se partagent le foot, le catch et les autres sports considérés comme mineurs ici. Les joueurs de l'équipe nationale sont des héros que tout le monde adore. Le Cricket c'est le seul sport qui intéresse le public en Inde, c'est donc normal que ce soit le seul qui attire tous les sponsors. Tous les sponsors cela veut dire que cela ne dérange personne de voir 3 compagnies téléphoniques, 2 marques de sodas, 4 bouquets TV, 3 marques de téléviseurs, 2 marque de motos, 3 de voitures, 3 banques différentes  et encore pleins d'autres telles que des noodles, des savons... La liste parait longue, surtout quand avant chaque diffusion, ils nomment la liste complète des sponsors. ça dure un certain temps.  Ici, si on n'associe pas son image de marque au cricket, on n'existe pas probablement!
J'ai essayé de savoir d'ou venait ce fanatisme pour le cricket, parce que avec mes yeux de français, j'avais du mal a comprendre. J'ai eu le droit a beaucoup de réponse, mais une sort du lot : " Le cricket c'est très facile" , enfin quand on a été initié quand même. "On peut y jouer partout et avec n'importe quoi", après vérifications, sur ce point nous sommes plutôt d'accord. Quand on n'a pas de batte, un bout de bois fera l'affaire. Quand on n'as pas de wickets (ces petits bâtons sur lequel on doit lancer la balle pour les faire tomber) et bien on prend des briques (il y a des briques partout dans ce pays c'est incroyable). Pour ce qui est du terrain, j'ai vu des parties se dérouler dans des parcs, des terrains vagues, dans la rue, sur les toits, dans des hangars, ou des entrepôts. Il me manque la carte brillante " sur le périphérique de Delhi" pour avoir la collection complète, mais je ne désespère pas de la trouver! Et il n'y a pas d'âge pour jouer non plus, cela va de soi.
L'économie, la croissance et le moral du pays dépendent des résultats de l'équipe nationale. J'en connais beaucoup qui ne mangent pas pendant au moins une journée en cas de défaite. Ceci c'est pour les moins extrémistes du cricket d'entre eux!
Certains sociologues se sont penchés sur la question du cricket en Inde. La conclusion est simple: Le cricket est le seul point commun entre tous les Indiens. Vue de France, l'Inde nous apparait comme un grand pays, très peuplé, mais on est très loin de s'imaginer toutes les différences qui existent. Les indiens ne parlent pas tous la même langue. L'hindi et l'anglais qui sont les deux langues officielles du pays sont parlées respectivement par 40% et moins de 10% de la population. Plusieurs religions sont présentes à travers tout le pays. Et ici dans le Nord, dans chaque petit village on peut trouver des Hindous, des Sikhs, des Musulmans pour ne citer que les trois principales. Depuis l'Europe, on pense que le cinéma indien est une véritable machine de guerre. C'est vrai, mais chaque région de l'Inde possède son style de cinéma. Et les films appréciés dans le Nord ne sont pas les mêmes que les films produits et adorés dans le Sud. Tous les films n'étant pas traduits dans les autres langues cela joue en cette défaveur. De même, les musiques présentes dans les films, qui représentes la plus grosse majorité des musiques diffusées à la radio ne sont pas traduites dans différentes langues, donc pas diffusées dans d'autres régions. Sur ce point, le cinéma indien, et sa musique ne rassemble pas tout le pays. Hormis quelques exceptions, les superstars de Bollywood ne sont pas des icones pour tout le pays non plus.
Je n'aborde pas la question évidente de la nourriture qui est incomparable d'une région à l'autre.
L'Inde, c'est donc cela, un immense melting-pot de cultures très différentes. Et la seule chose qui réunit TOUS les indiens derrière un but commun, c'est le cricket.
A première vue, le cricket c'est franchement barbant. Cela ne surprendra personne, c'est encore une invention diabolique des anglais. D'ailleurs il n'y a qu'à regarder la liste des pays présent à la coupe du monde pour le savoir. C'est la même liste que pour la coupe du Commonwealth (si elle existe!). Je vous rassure, je ne me suis pas transformé en Indien, au point de pouvoir regarder sans craquer pendant les 8 heures que dure le match. Le cricket c'est très pratique pour faire la sieste, encore plus efficace que les grands prix de formule 1. Mais il y a des moments d'actions et de forts suspenses avec des retournements de situations, et de pression intense, surtout pendant la coupe du monde. Donc quand on tombe sur des moments comme cela, le cricket est bien plus intéressant.
Tous les indiens que j'ai rencontré m'ont demandé si il y avait du cricket en France. Je les ai bien déçu ou surpris en leur révélant l'affreuse vérité : Personne ne s'intéresse au cricket chez nous, sauf la quarantaine de club qui existe ( j'ai fini par demander à Google à force d'avoir la question).
Mais comme le cricket c'est très important pour tout le monde ici, les entreprises ont libéré les salariés pour qu'ils puissent assister à la rencontre contre le Pakistan en demie finale. Les rues étaient désertes, et seuls les magasins possédant une TV étaient ouverts. Le match contre le Pakistan, c'est la rencontre que tout Indien souhaite. Ils souhaitaient la qualification du Pakistan en phase de poule pour que les deux pays puissent se rencontrer. Le plaisir d'éliminer le Pakistan semble suprême. Toute la semaine précédant le match, la tension était palpable, la presse rappelant tous les événements liant les deux pays. Le dernier en date restant les attentats de Bombay en 2008. Depuis cette date tous les contacts diplomatiques entre les deux pays ont été rompus. Comme me le répétaient les indiens : Tout peut désormais arriver avant, pendant et après le match... Les déclarations des politiques, des joueurs et d'autres personnes dans la presse ont attisé le débat et cela n'était d'ailleurs pas franchement rassurant. Imaginez Israël et Palestine disputer un match de foot... Finalement, le premier ministre indien a invité son homologue pakistanais au stade pour qu'il puisse discuter en regardant le match. Et ce dernier à la surprise générale a accepté. Ce qui a détendu l'atmosphère, mais n'a pas fait diminuer le nombre de personnels de la sécurité. Les Indiens on remporté ce match de la mort, les Pakistanais se sont bien défendus et ont reconnus la supériorité des Indiens, et finalement aucun incident majeur n'a été reporté.

Comme je l'ai dit, le gouvernement a pris des mesures draconiennes en terme de sécurité dans tous les stades. Et à mesure que la compétition avançait, et que l'Inde progressait dans le tableau, d'autres mesures moins évidentes sont apparues. Dans certains états, des efforts considérables ont été fait dans la gestion d'électricité pour minimiser les coupures durant les matches de l'équipe nationale. Ces mesures sont une première, et apparaissent comme exceptionnelles. Les coupures de courants sont en effet très fréquentes dans tout le pays.

Après leur superbe victoire en demie, les Indiens ont retrouvé les Sri-lankais en finale. Quand je vous disait que c'était un sport pour le Commonwealth! La le match a été très serré, surtout que le batteur superstar indien a été éliminé très rapidement. Mais finalement après 8h de match, de rebondissement et de course poursuite, les Indiens sont sortis vainqueurs. Ils obtiennent donc leur second sacre, près de vingt ans après le premier. Le milliard de téléspectateur a donc pu laisser éclater toute sa joie, et sortir dans la rue pour fêter ça. Après 8 heures de villes désertes, la foule est revenue dans la rue. Des feux d'artifices ont éclatés partout, jusque tard dans la nuit. Je suis monté sur le toit de mon immeuble pour voir ça, à 360 degrés, et sans discontinuer, des explosions de couleurs, des klaxons et des clameurs pour célébrer cet événement. Le commentateur du match a dit "la plus grosse party de l'année commence ce soir, et sa discothèque est l'Inde". Excusez du peu pour une discothèque! 

Des photos de Paniapt et de cricket ici :