Pour la fin du carême local, un jour férié était de mise. J’en ai donc profité pour m’éclipser de Panipat, et aller faire un peu de tourisme.
Je ne vais pas décrire ici le voyage en train pour rejoindre Amritsar, j’attends d’avoir un peu plus d’expérience dans les transports en communs indiens pour le faire. Il m’a néanmoins fallu 6h de voyage, assis sur une banquette plutôt inconfortable pour parcourir les 350 kilomètres qui séparent Panipat d’Amritsar. Le paysage laisse apparaître des champs de blés qui défilent tout le long du trajet. La moisson est très proche dans cette région de l’Inde. L’Haryana (là ou est Panipat), et le Punjab (là ou est Amritsar) qui sont deux des états du nord-ouest de l’Inde sont parmi les plus riches. Ils portent le nom de « grenier de l’Inde », et fournissent 80% du pays en blés et farines.
Si le Punjab est un nom qui semble familier à nos oreilles d’occidentaux c’est parce que ses habitants composent une diaspora dont les membres sont très présents au Royaume Uni, au Canada, et dans une moindre mesure, en France. Les Punjabis étant à grande majorité de confession Sikh, c’est pour cela qu’il est très courant de rencontrer des Indiens en turbans dans ces mêmes pays. Et preuve s’il il en faut que nos clichés sur l’Inde sont parfois faux: les Sikhs (et leur fameux turban) ne représente qu’une minorité de la population indienne (2%).
Ma destination du jour, Amritsar est une ville sainte pour les Sikhs, qui s’y rendent en pèlerinage très souvent. C’est donc pour cette raison que j’ai intitulé ce week-end : Voyage dans la capitale du turban.
J’ai rejoint Amritsar en début d’après-midi. Le temps de traverser la ville en rickshaw (les vélos porteurs) et je suis arrivé au Temple d’Or, lieu de convergence de tous les pèlerins, et touristes. Première impression, je suis dans une ville où les touristes sont nombreux, donc les vendeurs sont nombreux, donc les sollicitations sont permanentes. Je résiste donc à l’achat de magnifiques posters taille A1 avec des motifs aussi jolis que le temple d’Or, ou des trucs plus chics tels que des splendides bébés blanc tous joufflus, où des petits chiots dans un panier. Je me demande comment on peut oser vendre ça des fois. Et pire encore, qui peut bien les acheter.
Une fois ces premiers vendeurs franchis, d’autres me proposent des bandanas pour me couvrir la tête, c’est obligatoire pour entrer dans l’enceinte du temple. Peut être, mais je ne suis pas encore dans le temple et je ne vais pas acheter un bandana sale pour 10 roupies alors qu’il vaut probablement moins de 50 paisas (0.5 roupies).
Je m’avance vers l’édifice, laisse mon sac et mes tongs dans un vestiaire, trouve des bandanas gratuits (je vous l’avais dit!) et peut enfin pénétrer dans ce lieu formidable qu’est le temple d’Or.
C’est assez simple à décrire, et les photos parlent d’elles mêmes. Dans une enceinte carrée de bâtiments tout en marbre blanc, un immense basin est présent. Au milieu de celui-ci trône le temple d’Or en lui-même Un bâtiment tout doré qui renferme le livre saint des Sikhs. Cela fait un peu surnaturel, en tout cas c’est magnifique.
Les pèlerins font le tour du basin, certains s’arrêtent pour se baigner dans l’eau sacrée et font ensuite la queue interminable qui mène à l’intérieur du temple. Des haut parleurs crachent les chants de quatre personnes qui
Après avoir passé l’après midi à faire le tour du basin, à regarder les ablutions des fidèles, écouté les chants des prêtres et répondu aux nombreuses sollicitations des Indiens, je me décide à chercher un endroit ou dormir.
Un truc de formidable chez les Sikh, c’est que dans tous leurs lieux de culte (les Gurdwaras), il y a possibilité d’hébergement et de repas pour les pèlerins. Comme Amritsar, c’est le plus grand temple, les lieux d’hébergements sont proportionnés et tout le monde s’entasse dans d’immenses bâtiments.
Comme je suis arrivé un dimanche, l’endroit était surpeuplé, et les pèlerins s’installaient un peu partout pour dormir. Les chambres étaient surpeuplées, les couloirs infranchissables et même le grand patio intérieur ressemblait à un immense dortoir à ciel ouvert. Une petite chambre est réservée aux étrangers. Là aussi, ce sont des conditions très spartiates ou les lits sont empiles dans tous les sens. Certains personnes arrivées au milieu de la nuit on même dormi par terre, faute de lit.
Je réussi à obtenir un lit qui est en fait une grande planche de bois sur pieds et j’entamé la discussion avec les personnes présentes.
Cela fait du bien d’entendre un anglais prononcé autrement qu’avec l’accent indien si particulier. Je me rends aussi compte que en un mois et demi, mon niveau d’anglais a bien chuté. Cela vient surtout du fait que au quotidien je n’hésite pas à mal parler anglais pour mieux me faire comprendre.
Pour les repas, tout se passe dans un immense bâtiment. Il faut suivre la file de personne, attraper un plateau à compartiment, un bol et une assiette puis se diriger dans une immense salle ou tu le monde s’assoit en rangs d’oignons bien serrés (on est en Inde, donc on aime bien s’entasser les uns sur les autres). On pose le plateau devant soit et des bénévoles viennent le remplir. Comme c’est de la production en chaîne les serveurs versent la nourriture dans les plateaux à l’aide d’une louche sans s’arrêter entre les assiettes et de la même façon, l’eau est servie avec des arrosoirs, c’est bien plus pratique comme ça.
Des bénévoles s’agitent dans tous les sens pour s’assurer que tout le monde est servi. J’ai été très impressionné par autant d’efficacité dans l’exécution des taches. Après bientôt deux mois en Inde c’est une véritable surprise de voir un système aussi bien huilé fonctionner sans accroc. Surtout que les bénévoles tournent et qu’il faut les encadrer. Une fois le repas fini, on rend le tout qui part pour la vaisselle. On balance donc tout dans une énorme piscine et après 3 étapes de lavages et 5 de rinçage, les ustensiles repartent pour d’autres personnes. Tout est transporté dans d’immenses chariots, cela fait un vacarme terrible et surtout cela ne s’arrête jamais car la cantine et la cuisine tournent 7 jours sur 7, H24.
Comme j’avais un peu de temps à occuper, et que j’ai vraiment été bluffé par la logistique des repas, je me suis dit que j’allais sortir un peu des chemins touristiques pour aller jeter un oeil dans les coulisses. J’ai commencé par la machine à faire des chapatis (Pour les incultes, un chapati c’est comme un tortilla mexicaine, mais avec un goût plus proche de la crêpe bretonne et on mange tous les plats avec, pour les indian friendly, un chapati c’est un chapati). Cette machine est connue dans toute l’Inde, c’est un donateur libanais qui l’a offerte au temple. Depuis trois autres sont venues rejoindre la première et chacune peut produire plus de 1000 chapatis par heure. Tout le monde en est très fier. Une fois que j’étais rentré dans les cuisines j’allais pas en ressortir aussi vite, j’ai donc continué pour tomber sur des endroits ou d’autres personnes faisaient des chapatis à la main suivant la manière traditionnelle. Plus loin, d’autres femmes en saris étaient submergées par des montagnes d’oignons et de carottes et les préparaient inlassablement. Un peu plus loin des marmites immenses faisaient bouillir des lentilles et des poids chiches.
La visite n’étant pas finie j’ai découvert une pièce servant à alimenter les réchauds des marmites. Comme le gaz de ville n’existe pas vraiment, on improvise à la manière indienne : Plus d’une trentaine de bonbonnes de gaz étaient connectées en série!
J’ai également jette un œil dans les énormes entrepôts, ou toute la nourriture est stockée. C’est franchement ahurissant de voir de telles quantités, on se croirait dans une coopérative agricole qui vient de faire le plein, mais non, ici, tous ces stocks ont une durée de vie très limitée.
J’ai gardé le meilleur pour la fin (ou la faim): Deux IMMENSES marmites dans un coin reculé des cuisines. L’une servait à la préparation des lentilles, l’autre au dessert sucré à base de riz et de lait de coco.
La capacité de chacune de ces marmites (piscine serait un terme plus approprié) est de 2700 kilos. C’est bien ça oui, plus de 2.7 tonnes. Et ils font quatre tournées par jour… Pour nettoyer tout ça, et recommencer une autre tournée, c’est la lance à incendie gros calibre que l’on utilise pour l’alimentation en eau. Je n’ose pas imaginer le temps qu’il faut avant l’ébullition, je ne suis pas resté assez longtemps pour l’apprécier.
Une chose est sure, toute cette logistique est plus que bluffante, les proportions et les quantités consommées sont incroyables. La cantine permet de servir plus de 40 000 personnes par jour d’affluence régulière. Lors de festivals la quantité peut doubler.
Alors oui, après la visite des cuisines du Temple d’Or d’Amritsar, on peut le dire une fois de plus : Incredible India !!
Pour ceux qui veulent plus de détails sur les Sikhs, le Temple d’Or, ou la cuisine infernale : http://www.sikhiwiki.org/index.php/Golden_Kitchen
Pour voir mes photos de ce formidable week-end :
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